Économie circulaire et Économie sociale et solidaire

L’upcycling : un levier écologique à la réinsertion professionnelle

Par Marion Mauger, le 20 décembre 2018

©Marion Mauger

Dans l’atelier des Résilientes, une branche d’Emmaüs Alternatives à Paris, rien ne se jette, tout se transforme ! En pratiquant l’upcycling, l’équipe composée de personnes en réinsertion professionnelle, de bénévoles et de services civiques, redonne vie à des milliers d’objets abimés ou délaissés.  Dans ce projet fondé en 2017 par Eugénie Delarivière, la créativité est mise au service de l’environnement et de la réinsertion.

Hocine, ciseaux à la main, transforme les vieux livres en tabourets. Marie-Christine, derrière sa machine à coudre, fabrique des bouillotes doudou à partir de pulls déformés. Adama, elle, récupère des manches en cachemire pour en faire des mitaines et des bandeaux. Dans ce local du deuxième arrondissement de Paris, rien ne se perd, tout se transforme. L’équipe des Résilientes pratique l’upcycling ou surcyclage en français. « Nous détournons les matériaux d’origines pour en faire de nouveaux objets. Pour les livres par exemple, au lieu de les détruire pour en faire du papier recyclé, nous allons les redessiner pour en faire des tables basses », précise Eugénie Delarivière, la fondatrice aujourd’hui âgée de 30 ans. Créé en 2017, l’objectif des Résilientes est de redonner vie aux invendus d’Emmaüs Alternatives ou aux dons trop dégradés, comme des vêtements abimés, des cintres cassés ou encore des livres endommagés par exemple. Pour y parvenir, la chef de projet a eu l’idée de faire du design en série à partir de ces matériaux. « Il s’agit de faire une recette simple adaptable aux stocks parfois aléatoires. Par exemple, nous n’aurons jamais deux fois le même livre. Donc à chaque fois que l’on va répéter la recette nous n’aurons jamais le même produit. Nous faisons des pièces uniques en série ! »

Eugénie Delarivière, fondatrice des Résilientes.

Laisser libre court à son imagination

Ce procédé permet également de laisser libre court à l’imagination de l’équipe. Chacun peut choisir les matériaux ou les couleurs et même proposer son propre design. La mission des Résilientes n’est pas seulement de donner une seconde vie aux objets abimés ou délaissés, mais de permettre aussi à des personnes en situation de réinsertion professionnelle de renouer avec le monde du travail. « À travers ce projet, je voulais utiliser la créativité comme levier d’insertion sociale et professionnelle. Je suis convaincue que faire des choses avec ses mains permet d’augmenter l’estime de soi ainsi que des outils transférables dans d’autres métiers. Lorsque l’on créer un objet, on développe des compétences comme le travail en équipe, les respects des délais, la rigueur ou encore la capacité de résoudre des problèmes par exemple », précise Eugénie Delarivière.

Dans l’atelier, les spécialités de chacun sont mises à profit. Marie-Christine est la plus ancienne de l’équipe. Elle a rejoint les Résilientes en CDDI – contrat à durée déterminée d’insertion – il y a déjà un an et demi. À 63 ans, elle ne parvenait plus à trouver d’emploi. Ancienne costumière pendant 40 ans, son expertise dans le textile est précieuse au sein l’atelier. « Elle nous distribue les morceaux de pulls que nous utilisons. Elle sait ce dont nous avons besoin pour nos différentes créations », raconte Adama. Dans l’équipe cette seconde sexagénaire, originaire de la République de Guinée, est la reine du recyclage et du crochet. Pour preuve, soigneusement plié sous son plan de travail, elle montre fièrement à ses camarades un exemplaire des tapis de bain, réalisés à partir de sacs poubelles, qu’elle confectionnait avant d’intégrer les Résilientes.

Marie-Christine, ancienne costumière.

En quête de sens

Aux côtés des salariés, des bénévoles viennent porter mains fortes. Concentré dans la réalisation d’un tabouret en livre, Hocine est l’un d’entre eux. Algérien, il est arrivé en France il y a un peu plus d’un an et ne parvient pas à trouver de travail. « J’aime bien être ici. Je viens à l’atelier 2 à 3 fois par semaine, cela m’occupe. Comme je n’ai pas de papiers, c’est très difficile de trouver un emploi », confie ému le quadragénaire.  « Il y a un vrai mélange au sein de l’atelier. C’est une équipe de personne en transition. Il y a trois salariés en insertion professionnelle, payés grâce aux recettes de la boutique et au fond d’innovation d’Emmaüs France, deux bénévoles réguliers en reconversion ou confrontés à des problématiques sociales, et deux services civiques au tout début de leur carrière. Toutes ces personnes sont à un moment de leur vie où cela leur fait du bien de se retrouver autour d’un projet qui a du sens et qui est lié à la créativité », explique Eugénie Delarivière, au milieu des tas de livres et de vêtements eux aussi en cours de reconversion.

Après leur passage entre les mains de l’équipe des Résilientes, ces objets upcyclés, sont directement mis en vente dans la boutique située juste en dessous de l’atelier. En cette période de Noël, tabourets, bouillottes, mitaines prennent place au côté des productions d’autres créateurs pratiquant le surcyclage. De quoi satisfaire les retardataires en manque d’inspiration pour les fêtes.

Toutes les créations des Résilientes à retrouver au rez-de-chaussée.

 

Pour aller plus loin :

Les Résilientes, 13 rue Leopold Bellan, 75002, Paris : https://www.les-resilientes.com

Ce reportage est à retrouver dans notre hors-série 20 consacré à l’upcycling, disponible dans notre boutique en ligne.


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