Chronique de Pascal Greboval et Mouvements citoyens

Le jour d’après, le Covid-19 ? - Chronique de Pascal Greboval

Le jour d'après le Covid-19 par Pascal Greboval

Cela fait bientôt une semaine que la France se confine pour éviter que la pandémie du coronavirus ne prenne encore plus d’ampleur. Mais que peut nous apprendre cette crise sanitaire du Covid-19 qui touche le monde entier, sur la crise environnementale que nous traversons également ? Chronique de Pascal Greboval, le rédacteur en chef de Kaizen, sur le sujet.

Nous étions assis sur une branche que nous étions en train de scier, mais nous continuions à la scier. Nous clamions que le mur approchait, mais nous le montions, parpaing après parpaing. Nous criions que le lien valait plus que le bien et nous accumulions les objets inutiles. L’avoir avait terrassé l’être.

Nous étions certes quelques-uns à prévenir que ça ne tournait pas rond. Mais nous étions enfermés, aussi, dans notre confort. Et nous étions soumis au principe de la majorité, ce principe imposant un concept à tous quand bien même il est mortifère au prétexte que ses partisans sont plus nombreux. « Seraient-ils neuf cent quatre-vingt-quinze millions et moi tout seul, c’est eux qui ont tort […] et c’est moi qui ai raison parce que je suis le seul à savoir ce que je veux : je ne veux plus mourir », clamait pourtant Bardamu dans Voyage au bout de la nuit.

Et puis voilà qu’un petit microbe de quelques nanomètres venu de cette immense usine qu’est la Chine, où l’on a presque tout délocalisé pour ne pas avoir à subir ici la pollution, les conditions sociales déplorables, la dictature, s’est immiscé dans la machine. Ironie de l’histoire : nous avions externalisé tout ce qui nous gêne, le microbe vient frapper à l’intérieur de nos êtres.

Quel rapport entre cette crise sanitaire et la crise environnementale ? Ce sont deux symptômes, d’un même syndrome. Appelez ce dernier comme vous voulez : mondialisation ou néolibéralisme. Cette crise du Covid-19 nous rappelle que l’on ne peut pas tout diriger avec, comme seuls indicateurs, un tableau Excel et un taux de croissance. Depuis des années, on supprime des lits dans les hôpitaux, on rabote les budgets des services publics via le seul prisme de la finance. Et aujourd’hui, face à ce petit microbe devenu pandémie, nous sommes démunis. Dominique Bourg en donne aussi une lecture possible ici.

Le jour d'après le Covid-19 par Pascal Greboval

Alors, le jour d’après le Covid-19 ?

« Il nous faudra demain tirer les leçons du moment que nous traversons, interroger le modèle de développement dans lequel s’est engagé notre monde depuis des décennies et qui dévoile ses failles au grand jour, interroger les faiblesses de nos démocraties. […] Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner, notre cadre de vie au fond, à d’autres est une folie. […] Les prochaines semaines et les prochains mois nécessiteront des décisions de rupture en ce sens. » Pouvons-nous croire Emmanuel Macron quand il s’interroge ainsi devant la Nation ?

Sommes-nous prêts à le suivre, l’accompagner dans cette nécessité de changer ? Ou est-ce plutôt à lui de nous suivre ? Sommes-nous prêts à mettre en œuvre ce que nous n’avons pas su faire depuis cinquante ans ? Ou courrons-nous demain de nouveau de supermarché en hypermarché, important par cargos entiers des tonnes de produits qui finiront à la poubelle ?

Nous ne savons pas de quoi demain sera fait et ce qu’il va advenir de cette crise sanitaire, mais nous avons là comme un moment de pause pour construire ensemble un autre modèle de société. Je dis « pause », mais je pense bien sûr à tout le personnel soignant qui n’est pas, lui, en pause, qui est en première ligne et travaille et se bat, corps et âme, et malgré le manque de moyens, pour lutter contre la pandémie, prévenir, soigner et sauver des vies. Je pense bien sûr aussi aux malades, aux morts, aux familles endeuillées qui n’ont même pas pu accompagner les leurs. D’ailleurs, ce moment de pause doit aussi nous faire réfléchir sur le lien entre la rémunération et la valeur qu’apportent les gens à la société.

Samedi matin avant le confinement, j’ai jardiné, pour la première fois, avec mon voisin, un temps de travail chez l’un puis chez l’autre. C’est peut-être un détail, mais outre que Dieu et le diable se cachent dans les détails, nous étions heureux de jardiner ensemble – en respectant le mètre de sécurité. Ça nous semblait ouvrir de nouveaux horizons. La révolution n’est pas forcément au son du canon, on peut l’envisager au son de la communion.

Par Pascal Greboval


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