Bien-être

La Maternité des Lilas : un accompagnement multiforme pour mieux vivre sa grossesse



Parce qu’accoucher n’est pas qu’un acte physique, la Maternité des Lilas offre aux femmes enceintes un accompagnement multiforme et global, pour leur permettre de vivre pleinement ce moment et appréhender la grossesse dans toutes ses dimensions.

Le piano résonne joyeusement dans la salle Tatami aux murs peints en blanc, vert et rouge. Confortablement assises sur de gros ballons, cinq femmes au ventre arrondi font des vocalises : « Pio pio pio pio pio pio ! », « Oui oui oui oui oui oui ! » « Allez chercher l’appui dans le sol, pour donner de l’élan. Faites-vous confiance, vous en êtes capables », lance Marie-Laure Potel, qui anime l’atelier de chant prénatal à la Maternité des Lilas depuis plus de vingt ans. « C’est ici, en 1976, et à Pithiviers la même année, que le chant prénatal est né dans les maternités françaises, avec Marie-Louise Aucher », raconte-t-elle. Fondatrice de la psychophonie, une démarche novatrice qui considère que la voix relie les différents plans de l’être – physique, émotionnel, spirituel, énergétique –, cette musicienne et cantatrice a eu l’intuition, aujourd’hui confirmée par les recherches sur la sensorialité fœtale 1, que le fœtus est sensible aux stimulations auditives intra-utérines, notamment d’origine maternelle, qui participent à son développement perceptif. « Pendant la grossesse, chanter favorise aussi le bien-être, la détente de la femme enceinte, et affine la conscience corporelle, permet de sentir son corps, fait travailler la respiration, les abdominaux, autant de choses qui peuvent servir lors de l’accouchement », ajoute Marie-Laure Potel.

 

Se réapproprier la naissance

Le chant prénatal n’est qu’une des multiples approches non médicales de la grossesse que propose la maternité emblématique de Seine-Saint-Denis. Dans ce haut lieu, depuis les années 1960, de la défense du droit des femmes à accoucher dans le respect de leurs souhaits, les futures mamans ont accès à un éventail d’activités et de consultations de toutes sortes. « La synergie entre la médecine allopathique et les approches complémentaires est au cœur même de l’histoire de cet établissement, de sa culture, de sa philosophie », expose Marie-Laure Brival, chef du service de gynécologie-obstétrique et directrice médicale. La Maternité des Lilas a été fondée en 1964, dans la mouvance des Bluets à Paris et des travaux du Dr Fernand Lamaze sur la préparation à l’accouchement. Son crédo depuis toujours : permettre aux femmes de se réapproprier la naissance, en réaction à une médicalisation de plus en plus grande. Arrivée en 1982, Marie-Laure Brival défend cet héritage : « Rapidement et surtout à partir des années 1980-90, le médical a pris toute la place, avec des gestes systématiques : pose d’une perfusion, contrôle par monitoring, épisiotomie au premier accouchement, position allongée… Or plus de 85 % des naissances se passent de manière physiologique 2. Nous voulons que les femmes retrouvent leur place fondamentale dans cet événement. Sans nier pour autant les progrès de la médecine, qui ont réduit considérablement la mortalité et les complications. »

Les futures mamans bénéficient en effet du suivi médical classique, assuré par des gynécologues ou des sages-femmes, avec des consultations obstétricales à partir du troisième mois de grossesse, trois échographies, une consultation d’anesthésie obligatoire. Mais parallèlement, un accent particulier est mis sur la préparation à l’accouchement. « Redevenir actrice de la naissance, c’est d’abord comprendre les mécanismes de la grossesse et de l’accouchement, ce qui se passe lors d’une contraction utérine. Le premier objectif de la préparation, c’est le partage du savoir », souligne Marie-Laure Brival. Outre une réunion d’accueil de deux heures, quatre séances d’une heure quarante-cinq sont organisées par les sages-femmes de l’établissement sur la grossesse, le prétravail et l’accouchement. Une séance complète est consacrée aux positions d’accouchement, car aux Lilas, aucune obligation d’accoucher allongée, position souvent plus confortable pour le médecin que pour la patiente. « Ici, tout est possible ou presque. Certaines postures, par exemple accroupie ou debout, peuvent aider naturellement à faire descendre le bébé », confie Pakiza Goulamaly, l’une des sages-femmes.

 

Accompagnement à la carte

En complément, d’autres activités (généralement payantes) sont proposées sur le site même ou à l’extérieur : chant prénatal, yoga, haptonomie, sophrologie, préparation en piscine… La Maternité des Lilas a toujours été à l’avant-garde. Comme Marie-Laure Potel pour le chant, cela fait plus de vingt ans qu’Isabelle Koch anime les cours de yoga prénatal : celui-ci « aide à prévenir la sciatique, à gérer les modifications de centre de gravité. Nous travaillons aussi sur le souffle, les étirements, les sons, tout cela peut être utile lors de l’accouchement. Souvent, les femmes viennent ici avec l’idée qu’elles vont apprendre à se contrôler. Mais on ne contrôle pas la douleur. En revanche, nous pouvons donner des outils pour accompagner les mécanismes physiologiques et percevoir les microsensations de notre corps. Libre à elles ensuite de s’en saisir ou pas. » Certaines, comme Elsa, 33 ans, enceinte de cinq mois, sont assidues pendant toute leur grossesse. D’autres ne viennent que ponctuellement, comme Emeline, sur le point d’accoucher. Pour l’arrivée de son premier enfant, elle a choisi de compléter la préparation classique par de l’haptonomie, une pratique fondée sur les bienfaits du toucher et destinée à établir très tôt une communication entre les parents (les séances ont lieu en couple) et le bébé.

Aucun parcours n’est imposé. La large palette d’approches permet en revanche d’offrir une prise en charge holistique de la grossesse, qui sollicite la femme dans sa globalité : physique, psychique, affective, spirituelle. Accoucher est à la fois un bouleversement et un dépassement de soi. Des dimensions souvent négligées dans les « grosses » maternités : « Je ne voulais pas être un numéro dans une “usine à bébés”. Je me suis inscrite ici pour la naissance de mon premier, parce que je souhaitais accoucher dans l’eau, de la manière la plus naturelle possible », explique Chloé, enceinte de son deuxième enfant. La maternité dispose en effet d’une baignoire, autre spécificité. « Bon, après vingt-trois heures de contractions, j’ai fini par demander une péridurale et accoucher sur la table ! Mais j’ai essayé. Cette fois, je vais creuser les moyens de mieux supporter les contractions. » Coïncidence, Chloé retrouve à la maternité deux voisines de Pantin (Seine-Saint-Denis), elles aussi enceintes de leur deuxième enfant. Les trois amies vont accoucher à un mois d’intervalle et échangent sur leur première expérience. Bérangère, 34 ans, a pu, elle, donner naissance dans l’eau il y a cinq ans à sa petite Nefeli : « Accoucher sans péridurale, c’était un vieux fantasme, ma mère l’a fait, plein d’autres femmes le font. Je pratique le yoga, mais de l’Ashtanga, qui est un yoga plutôt dynamique. Ça m’a surtout servi pour le côté “guerrière”, pour tenir mentalement ! » « Moi, j’ai fait des “Om” [mantras chantés en yoga, NDLR] pendant des heures, renchérit Lucile, 37 ans, qui avait combiné pendant sa préparation yoga, haptonomie et piscine. C’est ce qui m’a le plus soulagée. Et ce qui est super ici, c’est que les sages-femmes n’ont pas été surprises du tout. Au contraire, elles m’ont tout de suite encouragée. »

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Une autre idée de la naissance

Humanité, écoute, bienveillance sont les mots qui reviennent le plus souvent à propos de l’équipe médicale. Comme les patientes, la trentaine de sages-femmes n’ont pas choisi l’établissement par hasard et viennent y défendre une « autre idée » de la naissance. Leur recrutement se fait par « cooptation » et passe par des stages de formation à l’accouchement physiologique. Plus de la moitié d’entre elles se sont aussi formées à des médecines alternatives. « Il y a clairement une ouverture vers ces profils », indique Frédérique Goualard, arrivée en 1990 et sage-femme coordinatrice depuis fin 2017. Les approches complémentaires trouvent naturellement leur place à toutes les étapes de la grossesse. Des consultations d’acupuncture et d’ostéopathie sont accessibles sur rendez-vous. « Il y a un point dit du “beau bébé”, qu’il faut stimuler à 3, 6 et 8 mois pour maintenir l’équilibre de la grossesse. Et l’acupuncture est efficace pour plein de petits maux : nausées, sciatique, œdèmes, hémorroïdes, détaille Marie Eruimy, l’une des trois sages-femmes formées à cette technique chinoise. Elle peut aussi être utilisée pour aider à la version d’un bébé en siège, en chauffant régulièrement un point au niveau du doigt de pied. »

D’autres sages-femmes peuvent donner des conseils en homéopathie, l’une d’elles s’est formée récemment à l’aromathérapie. « La thérapeutique allopathique est très limitée, surtout au premier trimestre. Les médecines alternatives peuvent apporter une réponse en évitant la prise de médicaments », note Élise Petit, formée à l’homéopathie. Le jour J, l’équipe prend en compte les souhaits de la future maman, et peut aussi faire des propositions, selon le personnel en poste. « En salle de naissance, il m’arrive de proposer de l’homéopathie, par exemple à une patiente en situation de stress ou de perte de confiance », indique Élise. « Il y a quelques jours, j’ai utilisé l’acupuncture pour une dame dont le travail stagnait. En deux heures, le col s’est assoupli », raconte Marie. Tant qu’il n’y a pas urgence médicale, les sages-femmes restent aux commandes. Mais en cas de besoin, la médecine allopathique prend le relais. 13 % des naissances ont lieu par césarienne, un chiffre inférieur à la moyenne nationale (20,4 %), tout comme celui des épisiotomies : 11 % (contre 20 % au niveau national). Et même si 75 % des femmes aux Lilas finissent par opter pour la péridurale, c’est moins, là encore, que le taux moyen national de 82 % 3. À toutes les étapes, l’équipe prend le temps d’étudier toutes les solutions possibles, y compris en cas de dépassement de terme. Là où beaucoup de maternités déclenchent l’accouchement au-delà de deux ou trois jours après la date estimée du terme, Les Lilas assurent, en l’absence d’indication médicale, une surveillance jusqu’à J+6. Ce dont a pu bénéficier Anne-Claire, maman d’une petite Sarah née le 14 juillet. « Je redoutais le déclenchement parce que les médicaments utilisés provoquent souvent des contractions plus douloureuses [et un risque accru de césarienne, NDLR], raconte cette jeune femme de 29 ans. Là, j’ai pu faire une séance d’acupuncture à J+3, et le sixième jour, j’ai perdu les eaux. La sage-femme a encore obtenu un délai supplémentaire de l’obstétricien pour voir si le travail se mettait en route. J’ai finalement pu accoucher sans péridurale. Tout s’est bien passé, comme je le souhaitais, le plus naturellement possible, c’était une merveilleuse aventure. »

 


1 Voir notamment Jean-Pierre Relier, « Importance de la sensorialité fœtale dans l’établissement d’un échange mère-enfant pendant la grossesse », Archives de Pédiatrie, 3, mars 1996, et plus récemment Carolyn Granier-Deferre et Marie-Claire Busnel, « L’audition prénatale, quoi de neuf ? », Spirale, 59, Érès, 2011.

2 Pour les grossesses spontanées survenant à un âge dit « normal » (entre 15 et 35 ans), sans pathologie associée.

3 Enquête nationale périnatale. Rapport 2016, Inserm/Drees, octobre 2017.

Le 6 juillet 2020
© Kaizen, explorateur de solutions écologiques et sociales

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