Du 5 au 12 octobre 2019, le mouvement Extinction Rébellion (XR) organisait la semaine de la Rébellion Internationale d’Octobre (RIO) à travers le monde. En France, des militant.e.s écologistes ont convergé vers Paris, où se tenait l’essentiel des actions du mouvement. Patrick Châtelais, membre de XR Bretagne et du groupe local XR Terre et Mer, a participé à cette semaine de rébellion pour le climat.
Mercredi 2 octobre dernier, nous vous avons rencontré à Rennes. Vous vous prépariez à rejoindre Paris à vélo, à l’occasion de la semaine de la Rébellion Internationale d’Octobre (RIO). Comment avez-vous vécu cette semaine ?
Nous étions six militants à être partis de Rennes à vélo. Nous étions accompagnés par une voiture tout au long de notre voyage. Nous sommes arrivés dimanche 6 octobre dans la capitale, où des personnes avaient proposé de nous héberger pendant la RIO. Le soir même, je me suis rendu à l’ouverture de la RIO organisée par Extinction Rébellion, à la Villette.
L’équipe de militants d’Extinction Rébellion partis à vélo de Rennes pour rejoindre la Rébellion Internationale d’octobre à Paris / ©Ingrid Bailleul
L’action principale du lundi 7 octobre a été le blocage du pont au Change et de la place du Châtelet.
Les 8 et 9 octobre, de nombreux ateliers et conférences étaient organisés place du Châtelet, où nous avions installé notre ZAD [Zone à défendre, ndlr].
Mardi 8, le pont au Change a été fermé par les forces de l’ordre pour le passage du convoi funéraire des quatre fonctionnaires tués à la Préfecture de Paris. Nous avons alors tenu une assemblée générale, parce que le convoi devait passer au milieu de la ZAD. Tout le monde était d’accord pour laisser passer le cortège et observer une minute de silence. Mais finalement, le trajet officiel a été modifié.
Vendredi 11, s’est tenue l’action Tournez manèges sur la place de l’Étoile pour encourager l’utilisation du vélo plutôt que la voiture. Cette action était plutôt réussie, malgré des blocages importants de la police. Nous étions très nombreux. Malheureusement, les forces de l’ordre ont séparé notre cortège en plusieurs groupes. Certain.e.s d’entre nous se sont retrouvé.e.s bloqué.e.s. Le groupe dans lequel j’étais a été immobilisé pendant deux heures ! D’autres groupes nous ont ensuite rejoint.e.s, et nous avons été escorté.e.s par la police jusqu’à la place du Châtelet. C’était comme s’ils nous ramenaient à la maison ! Cerise sur le gâteau, en nous faisant passer par des rues très commerçantes, nous avons bénéficié d’une publicité qui n’était pas prévue !
Action de blocage de la place de l’Etoile à Paris par @XtinctionRebel avec de nombreux cyclistes. Intervention des forces de l’ordre.
Direct à suivre sur @brutofficiel. pic.twitter.com/0bx20dJPW4
— Remy Buisine (@RemyBuisine) October 11, 2019
Bien que sous haute surveillance, vous n’avez pas été délogé.e.s de la ZAD à Châtelet par les forces de l’ordre. Comment l’expliquez-vous ?
Comme tout le monde, nous étions surpris d’être plus ou moins considéré.e.s persona grata, que notre présence était presque légalisée. Initialement, nous ne savions pas combien de temps nous allions rester là. Je pense qu’il y a eu un concours de circonstances, notamment ce passif du pont de Sully, où des militants avaient été gazés. [NDLR : Le vendredi 28 juin 2019, des militants d’Extinction Rébellion ont bloqué le passage des voitures sur le pont Sully, à Paris. Après près d’une heure d’occupation du pont, des CRS ont tenté de les déloger en les aspergeant de gaz lacrymogènes. Les images n’ont pas manqué de circuler dans les médias et sur les réseaux sociaux.]
L’image de cette répression d’une action non-violente nous a été plutôt bénéfique. Donc les autorités ont dû se dire qu’il ne fallait plus qu’elles y aillent en force, parce que notre mouvement est plutôt bien perçu dans l’opinion. Et puis notre blocage n’empêchait pas la circulation ailleurs, c’était assez bien réfléchi. Grâce à cela, les tensions sont vite retombées. On l’a vue encore cette semaine : la non-violence, c’est le seul moyen de gagner !
Die-in a été organisé par Extinction Rébellion en hommage aux victimes des barrages hydroélectriques à la Défense le 14 mai 2019 / ©Cypriane El-Chami
Quel est le message que vous vouliez faire passer à travers cette semaine d’actions ?
Nous portions bien sûr les revendications d’Extinction Rébellion1. Nous attendons principalement la reconnaissance de l’état d’urgence climatique. Même si ce n’est pas une mesure contraignante, c’est l’un de nos chevaux de bataille et ce serait un bon début. C’était également une action de séduction, pour mobiliser et recruter de nouveaux militant.e.s, mais aussi informer toutes ces personnes qui ne savent pas encore ce qui va nous arriver !
Enfin, l’intérêt était que nous fassions une démonstration de force à l’échelle internationale. Nous allons d’ailleurs recommencer ces opérations de communication au mois d’avril de l’année prochaine. Bien sûr, la désobéissance civile implique de gêner un peu les gens, mais c’est dans la non-violence, et ce n’est rien du tout face à l’urgence climatique !
Propos recueillis par Cypriane El-Chami
1Extinction Rébellion France précise sur son site internet que ses revendications sont les suivantes : « la reconnaissance de la gravité et de l’urgence des crises écologiques actuelles et une communication honnête sur le sujet ; la réduction immédiate des émissions de gaz à effet de serre pour atteindre la neutralité carbone en 2025, grâce à une réduction de la consommation et une descente énergétique planifiée ; l’arrêt immédiat de la destruction des écosystèmes océaniques et terrestres, à l’origine d’une extinction massive du monde vivant ; la création d’une assemblée citoyenne chargée de décider des mesures à mettre en place pour atteindre ces objectifs et garante d’une transition juste et équitable. »
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