Agriculture

Corentin Gaillard - De Centrale aux micro-pousses

Par Jeanne Nicolle-Annic, le 11 septembre 2020

Corentin Gaillard

Jeune diplômé d’une école d’ingénieur, Corentin Gaillard a fait le choix de tourner le dos à un avenir conventionnel pour se rapprocher de ses valeurs. Il s’est engagé vers un service civique dans une ferme urbaine à Nantes, l’Agronaute, et ne le regrette pas.

Vingt-quatre heures par semaine, Corentin Gaillard, 24 ans, s’épanouit au milieu des pousses et des plantes, sous une serre, les mains dans la terre. Une ambiance bien éloignée de celle de la machine à café et des réunions costume-cravate auquel il se prédestinait.  Car il y a encore un an, il squattait les bancs de l’école d’ingénieur Centrale de Nantes, cinquième école sur les 130 françaises classées par le magazine spécialisé l’Usine Nouvelle en 2019. Salaire moyen des jeunes diplômés ? Entre 36000 et 40000 € bruts par an. La voie royale.

 

“Pas envie d’alimenter un système mortifère”

Mais voilà, le jeune homme, qui aurait pu se tourner vers “la finance, le consulting ou l’industrie” regarde ailleurs. “À la fin de mon dernier stage,  je suis entré en réflexion. Je n’avais pas envie d’alimenter le système mortifère pour lequel on est vraiment façonné en école et qu’intellectuellement, je combats.”

Métro, boulot, dodo, les 39 heures, la lessiveuse dont on sort éreintés, l’impossibilité d’avoir du temps libre, non. Il s’oriente vers un service civique, dispositif qui permet aux Français âgés de 16 à 25 ans de réaliser une “mission d’intérêt général” au sein par exemple d’associations, un engagement de 24 heures par semaine. Le temps d’avoir le temps, de penser à ce qui lui plaît. On n’est pas pressé, quand on a 24 ans. “Le travail, ce n’est définitivement pas la vie.”

 Rapidement, il tombe sur une annonce postée par la Sauge, association gestionnaire de l’Agronaute, une ferme urbaine installée sur l’Île de Nantes, qui prône “la transition d’une société écolocide vers une société écologique.” Corentin s’y retrouve. “Le lien à la terre me tentait avant de voir cette annonce, j’avais envie et besoin d’apprendre.” Au cours de son cursus généraliste, il avait pu choisir une option ingénierie de la transition écologique. “Une journée par semaine, nous pouvions assister à des conférences, des débats, des discussions. C’est très rare en école d’ingénieur d’avoir un temps réflexif, d’avoir un cours qui remet en cause les discours « habituels »”. Quant à son stage de fin d’études, il s’articulait autour d’une problématique : “Repenser le rôle de l’ingénieur du point de vue de la décroissance.” Le jeune homme retrouve à l’Agronaute un réflexion autour de l’agriculture, de l’alimentation, couplé avec l’espace urbain.

 

Micro-pousses et livraisons à vélo

L’expérience débute en octobre 2019. À la ferme urbaine, il s’occupe particulièrement des micro-pousses, des plants de tournesol, de roquette, de choux ou encore de pois, coupés au premier stade de développement. “Faire les semis, les récolter, les semer scande mes journées”, récapitule Corentin. Il assure également les livraisons, en vélo bien sûr, pour des restaurateurs nantais. L’occasion pour l’ex-étudiant ingénieur, passionné par l’espace urbain, de découvrir une autre facette de la ville, loin du tohu-bohu des horaires de pointe.

Sa mission inclut une partie pédagogique. Un mardi sur deux, la ferme urbaine accueille l’association Les Eaux Vives, qui lutte pour l’inclusion des plus démunis. “On propose des activités aux sans abris ou aux migrants notamment, un mardi après-midi sur deux. On les accueille, on apprend à jardiner avec eux.”

Le bilan de ce service civique ? “Cela m’a permis d’apprendre beaucoup et confirmé mon intérêt pour le jardinage, l’agriculture …” Tracée en forme de point d’interrogation, la suite de son parcours semble toujours éloignée de l’ingénierie. Mais si Corentin a acquis une certitude, c’est que dévier de l’autoroute post-grande école était le bon choix.  “Je n’ai aucun regret.”


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