Une contamination inquiétante qui touche des millions de personnes
Un récent rapport publié par la CRIIRAD (Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité) met en lumière une problématique alarmante : la présence de tritium dans l‘eau potable consommée par au moins 9,6 millions de personnes en France. Ce produit radioactif, rejeté par les centrales nucléaires et les sites de production d’armement, contamine durablement les ressources hydriques, sans que les mesures de contrôle ou de transparence soient réellement suffisantes.
Une contamination qui s’étend sur tout le territoire
Les régions les plus touchées comprennent 663 communes, où la concentration de tritium atteint ou dépasse 10 becquerels par litre à plusieurs reprises, un seuil cinq fois supérieur au bruit de fond naturel. Si l’on élargit à toutes les zones où du tritium a été détecté, ce sont 2 392 communes et 16,6 millions de Français·es qui sont concernés.
Les secteurs impactés sont majoritairement situés en aval de cours d’eau recevant des effluents radioactifs, rejetés par des centrales nucléaires. Les zones les plus touchées incluent :
- Île-de-France (dont Paris, Créteil et Versailles) via la Seine,
- Les vallées de la Loire (Nantes, Tours, Orléans),
- Le bassin du Rhône (Lyon, Bollène),
- Les cours d’eau de la Garonne (Agen, Marmande) et de la Vienne (Châtellerault).
Un cas spécifique concerne la Côte d’Or, où le centre CEA de Valduc, spécialisé dans la fabrication d’armes thermonucléaires, constitue la principale source de rejets de tritium par voie atmosphérique. Ce département compte 77 communes contaminées de manière chronique.
Des lacunes dans le contrôle et des origines incertaines
La situation est aggravée par le manque de précision des analyses officielles, qui ne permettent pas toujours de détecter l’impact réel des rejets nucléaires actuels. À cela s’ajoutent près de 4 000 communes sans aucune donnée disponible, ce qui constitue une violation de l’obligation de contrôle instaurée en 2005.
Par ailleurs, des contaminations ponctuelles sont relevées dans de nombreuses communes où les sources ne sont pas clairement identifiées. La CRIIRAD encourage les citoyen·nes à utiliser les données qu’elle met à disposition pour enquêter localement sur ces cas inexpliqués.
Des normes obsolètes face à l’augmentation des rejets
La CRIIRAD tire également la sonnette d’alarme sur la nécessité urgente de revoir les normes actuelles, jugées insuffisamment protectrices. Avec la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, les rejets de tritium dans l’environnement sont appelés à croître, accentuant les risques sanitaires pour les populations concernées.
Transparence et actions nécessaires
Depuis 2019, la CRIIRAD réclame une documentation systématique des communes touchées par cette contamination, sans réponse suffisante des autorités. Face à l’inaction, l’organisme a pris l’initiative de compiler les données officielles dans un dossier public, accessible sur son site.
Ce rapport met en lumière des enjeux cruciaux de santé publique et de transparence. Alors que l’industrie nucléaire poursuit son développement, une mobilisation citoyenne et institutionnelle s’impose pour garantir la sécurité des ressources en eau potable.